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Étrange paradoxe que je vous propose là !
Combien d’entre nous courent après le temps, blâment, râlent, font porter à d’autres l’envahissement de leur agenda.
Avez-vous déjà essayé de mesurer votre temps de travail, pendant une semaine ?  Juste une semaine !
Prendre conscience de la façon dont vous passez votre temps de travail, c’est la première étape pour reprendre la main, revenir en responsabilité par rapport aux secondes qui s’écoulent.
Vous en ressortirez nourris de sacrés enseignements. Que vous soyez manager ou travailleur indépendant, tracer son temps, le mesurer, c’est reprendre le contrôle sur Chronos pour ensuite ralentir, prendre le temps ou même le perdre si bon vous semble.

« Souviens-toi que le Temps est un joueur avide
Qui gagne sans tricher, à tout coup! C’est la loi. »
Baudelaire, L’horloge, les Fleurs du Mal

Les leçons du Time tracking sur 25 ans

J’ai suivi ma première formation en « gestion du temps » en 1997. Responsable du contrôle de gestion, je gérais alors, en plus de mes tâches de production, une équipe et un projet transverse pour les migrations des services financiers.  Le temps était, à cette époque, ma ressource la plus rare.

Time System© déployait alors ses premières formations en France ; l’animateur nous avait demandé de tracer notre temps de travail, sans rien changer à nos habitudes.
Nous avions ensuite analysé le temps passé, en formation ; les leçons tirées étaient profitables et instructives.

Depuis, j’ai pris l’habitude, chaque fois que le temps s’accélère ou que j’ai l’impression de ne pas être efficace,  de revenir à la bonne vieille méthode «je mesure mon temps de travail pendant une semaine ».

A l’époque, les suivis se faisaient sur Excel. Aujourd’hui, une pléthore d’applications simples et conviviales sont  accessibles sur ordinateur, smartphone ou tablette ! Quel gain de temps, justement !

Les avantages collatéraux de la « recherche du temps perdu »

Récemment, j’ai dû remettre en place partiellement un suivi de temps afin de pouvoir  facturer précisément et en détail un client. Ça tombait bien car je trouvais ma production faiblarde depuis la rentrée et j’avais l’impression de fonctionner au ralenti.

Ainsi, j’ai redécouvert sept bonnes raisons de suivre son temps :

  1. Avoir une vision globale de son temps de travail : les macros.

    J’ai été étonnée de découvrir la répartition réelle entre mes temps passés en formation, coaching, administratif, réunions et divers engagements sociétaux.
    Pour un manager qui jongle entre la production, le suivi de ses équipes et des projets transverses, c’est une information vitale –pour ensuite décider, arbitrer, négocier (voir au point 7).
    Pour les freelances ou slasheurs, la découverte de ces macros peut également amener à prendre des décisions (voir au point 7)

  2. Prendre conscience de vos temps réellement passés par rapport au temps ressenti.

    Combien d’entre vous ont déjà eu l’impression de passer des heures sur un dossier alors qu’en réalité ce n’était qu’une trentaine de minutes ou vice versa[mfn]il s’agit de la loi de Paul Fraysse, psychologue français qui a travaillé sur la subjectivité du temps : les minutes ralentissent ou s’accélèrent selon le plaisir ressenti par rapport à la tâche réalisée[/mfn].
    Cette prise de conscience peut réduire vos frustrations par rapport au temps passé sur les tâches ingrates ; pensez à utiliser la méthode Pomodoro – consiste à fractionner l’organisation du travail avec pour bénéfice de réguler nos états intérieurs en lien avec le temps qui défile.
    Un décalage entre le temps passé et un temps ressenti comme trop long/lourd indique parfois une charge mentale importante. En effet, un espace mental ou une énergie irrationnelle sont consommés par le(s) thème(s) qui vous taraudent. Vous avez ainsi le sentiment de passer beaucoup de temps sur un sujet alors que ce n’est pas forcément le cas ; il s’agit simplement d’une énergie mentale omniprésente qui crée une distorsion dans votre perception des minutes écoulées. La simple mesure du temps passé peut alors vous apporter une certaine sérénité.

  3. Prendre conscience du temps réellement travaillé ou du temps perdu en distractions diverses ou en tâches qui ne servent à rien sinon à procrastiner –genre regarder une palanquée de tutos sur la gestion du temps. Au passage, si vous avez tendance à procrastiner, vous pouvez toujours vous rabattre sur les pomodoros.
    Croyez-moi, analyser vos temps de (non) pause peut être terrifiant !! Parfois, c’est l’absence de pause et la prise de conscience du temps passé sans jamais s’arrêter qui est alarmant et vous indique qu’il faut changer votre façon de faire. Trop travailler n’est jamais productif. Jamais ! [mfn]Rappel de la loi d’Illich : « Au-delà d’un certain seuil, l’efficacité humaine décroît, voire devient négative »[/mfn]
  4. Mesurer le temps réellement passé devant un écran.

    Cette découverte m’a fait mal car la semaine de rédaction de ce billet, j’ai passé 25 heures en 2 jours sur zoom, en réunions. Autant dire que je n’ai eu aucun scrupule à prendre une demi-journée loin des écrans et en plein air. Pensez à offrir une pause à vos yeux !

  5. Conscientiser le temps passé irrationnellement sur certaines besognes ou projets.

    Passer un temps injustifié sur certains sujets est un indicateur : dysfonctionnement d’organisation ou manque de compétences ou besoin de pause. Selon les cas, il s’agit simplement de monter en compétences et donc de planifier des moments pour s’auto-former. Parfois, il s’agit de déléguer.
    Ou encore, ce temps indique une appétence pour une tâche : avez-vous remarqué que certaines actions vous ressourcent, vous avez le sentiment de vous reposer en les réalisant ? C’est mon cas lorsque je fais de la comptabilité (oui je sais, c’est bizarre ! A chacun ses marottes) et c’est souvent un indicateur d’un fort besoin de pause.

  6. Être plus efficace pour ne plus « tricher » avec le temps.

    Pour ma part, je constate une hausse de ma productivité chaque fois que je trace le temps de travail. Systématiquement, je travaille moins d’heures tout en produisant davantage.
    Chaque fois que j’ai mis en place un suivi du temps, j’ai observé ce même phénomène. C’est lié au fait que je tolère moins d’interruptions : si je m’interromps, j’ai l’impression de tricher.
    J’en profite ici pour vous rappeler la loi de Carlson[mfn]“une tâche effectuée en continu demande moins de temps et d’énergie qu’une tâche réalisée en plusieurs fois”. Car il faut en général au moins 3 minutes pour se replonger dans une tâche interrompue. Je vous laisse imaginer les dégâts à l’heure où les notifications nous interrompent constamment. Cette loi est parfaitement compatible avec la méthode Pomodoro qui propose de regrouper des tâches de même nature.[/mfn]

  7. Diagnostiquer pour se donner les moyens de changer

    Analyser son temps, c’est se donner les moyens de réaliser les minutes perdues, utilisées de façon inefficace, les interruptions, le manque de moyens ou de compétences. Vous disposer d’un diagnostic qui vous permet ensuite de prendre des mesures pour vous organiser différemment.
    Ainsi, que vous soyez, manager, acteur d’un projet transverse ou freelance/ slasheur, vous pouvez arbitrer, décider, négocier et retrouver le chemin du temps plus paisible.

Prêt.e à  tracer votre  temps ? Certes, vous perdrez un peu de temps, au démarrage, pour mettre en place ce suivi : un investissement à faire envers vous-même. Parce que vous le valez bien !

Les outils pour mesurer son temps

Le nombre d’applications disponibles pour tracer notre temps en dit long sur la relation de notre société à la recherche du temps perdu.
Cet article vous propose plusieurs applications traduites en français.
Pour ma part, après avoir testé quelques outils, j’ai jeté mon dévolu sur TMetric en raison de son intégration à plusieurs logiciels, dont Evernote [mfn]Outil multi plateforme pour prendre des notes et stocker des informations sur plusieurs supports ![/mfn]

Personnellement j’aime être efficace pour ensuite perdre mon temps ou prendre le temps, slow attitude, regarder la beauté du monde, prendre un café à une terrasse en donnant l’impression à l’autre que mon temps est infini.

Alors, revenir en responsabilité par rapport à votre temps et ne plus subir les minutes et secondes qui s’égrènent, ça vous tente ?

 


NOTES (au gré de votre lecture, vous pouvez lire ces notes en cliquant sur les petits chiffres) :

  1. il s’agit de la loi de Paul Fraysse, psychologue français qui a travaillé sur la subjectivité du temps : les minutes ralentissent ou s’accélèrent selon le plaisir ressenti par rapport à la tâche réalisée
  2. Rappel de la loi d’Illich : « Au-delà d’un certain seuil, l’efficacité humaine décroît, voire devient négative »
  3. Loi de Carlson : “une tâche effectuée en continu demande moins de temps et d’énergie qu’une tâche réalisée en plusieurs fois”. Car il faut en général au moins 3 minutes pour se replonger dans une tâche interrompue. Je vous laisse imaginer les dégâts à l’heure où les notifications nous interrompent constamment. Cette loi est parfaitement compatible avec la méthode Pomodoro qui propose de regrouper des tâches de même nature.
  4. Evernote : Outil multi plateforme pour prendre des notes et stocker des informations sur plusieurs supports !

CRÉDIT IMAGE : visuel réalisé sous Canva avec une image Pixabay libre de droits d’ Alexas